Chapter 1: Introduction : Traque Acharnée
Summary:
NDT : Cette histoire s'inscrit dans une suite d'histoires plus grande construite autour du Canon que je suis en train de traduire petit à petit :) . Plus de détails sur la chronologie ici
Notes:
(See the end of the chapter for notes.)
Chapter Text
Introduction : Traque Acharnée
Ron Weasley leva les yeux de sa place au bureau des Aurors. À côté de lui, Harry Potter, silencieux, fixait le paravent derrière son propre bureau. Il était plongé dans ses pensées.
Ron regarda son propre paravent et sourit. Une photographie d’Hermione, bronzée et détendue dans la vieille ville de Rhodes, lui sourit en retour. Le cliché avait été pris deux jours avant la fin de leurs vacances d’été. Hermione portait un short et un débardeur court. Ron contempla ses bras, ses jambes et son ventre hâlés, et jeta un regard désabusé à sa propre peau pâle et constellée de taches de rousseur. Hermione et Harry étaient revenus de ces vacances bien bronzés. Lui et sa sœur, en revanche, étaient revenus rosés et encore plus couverts de taches de rousseur que d’habitude.
Il jeta un coup d’œil aux deux autres photos punaisées sur son paravent. La première était la dernière photo de famille de Noël des Weasley. On y voyait une douzaine de personnes : ses parents ; Bill et Fleur (enceinte de cinq mois au moment de la photo) ; Charlie ; Percy ; George, accompagné de la cousine de Fleur — comment s’appelait-elle déjà ? Claudine (cette relation avait duré neuf semaines, un record pour George) ; puis lui-même avec Hermione et Harry avec Ginny. Audrey Midgen avait accepté avec plaisir de prendre le cliché, puisqu’elle refusait d’apparaître devant l’objectif. Ron n’avait aucune idée de ce que Percy lui trouvait.
La deuxième photo représentait l’équipe des Canons de Chudley 1999/2000—celle qui, le mois précédent, avait enfin réussi à gagner un match à l’extérieur, une première depuis cinq saisons. Ginny s’était beaucoup moquée des célébrations de Ron, mais, fidèle supporter des Canons qu’il était, Ron savait combien il fallait savourer chaque petite victoire. La voix de sa sœur résonnait encore dans son esprit : « Parce que tu sais très bien que tu ne vivras jamais assez longtemps pour voir une grande victoire. »
Ron s’ennuyait. Il n’avait pas réalisé à quel point le travail d’Auror pouvait être monotone : rester assis à lire des rapports et vérifier, de temps en temps, des signalements de suspects en fuite qui, presque invariablement, ne menaient à rien. Harry semblait y prendre goût, mais Ron avait souvent l’esprit ailleurs. Il fallait convaincre George de diversifier à nouveau leurs affaires.
En parcourant le stick alors qu’il aidait son frère à ranger la boutique, Ron avait réalisé que Weasley Farces pour Sorciers Facétieux n’avait jamais été une simple boutique de farces et attrapes. George n’aimait pas l’entendre, mais même l’année de l’ouverture, ils avaient également vendu d’autres choses : des Chapeaux Boucliers, des capes, des gants et des Détonateurs leurres. Du matériel magique et des contrats ministériels, voilà où se trouvait l’argent.
Lorsqu’il avait trouvé le Portolivre malicieux sur lequel Fred et George travaillaient juste avant la bataille, Ron l’avait ouvert dans la boutique et s’était aussitôt retrouvé dehors dans la rue, en sous-vêtements. Le Bureau des Portoloins n’avait guère apprécié qu’un Auror stagiaire active un Portoloin non autorisé, mais cette mésaventure avait donné une idée à Ron : l’usage pratique de Portoloins déclenchés par une ouverture ou une fermeture, plutôt que par un délai ou un simple contact.
Il leur avait fallu des mois pour perfectionner le sortilège, mais le résultat fut les Portomenottes Weasley. Ce qui, à l’origine, n’était qu’une idée de blague de Fred, s’était transformé en un contrat ministériel lucratif, qui avait sauvé l’entreprise de George alors au bord de la faillite.
Ron savait que les affaires allaient mal depuis la guerre, mais George refusait de l’admettre. La semaine précédente, après vingt mois de travail et de formation au bureau des Aurors, Ron avait enfin fini de rembourser auprès de Harry ses gains du Tournoi des Trois Sorciers. Harry n’en avait pas besoin, et il l’avait dit clairement. Mais cet argent avait une autre importance. Quoi qu’en dise Harry, l’argent qu’il avait donné à Fred et George pour lancer leur boutique était une dette. Maintenant, Ron l’avait remboursée. Et cela signifiait que désormais, ce n’était plus à Harry que George devait de l’argent, mais à Ron.
Pendant des mois, Ron avait aidé son frère à maintenir à flot l’entreprise qui était en grandes difficultés. Il avait été le conseiller et l’assistant non rémunéré de George, mais celui-ci refusait de le reconnaître. « Ça ne me gêne pas que tu m’aides, petit Ronnie, mais rappelle-toi que je suis dorénavant l’unique propriétaire de Weasley Farces pour Sorciers Facétieux, » lui avait dit George des mois plus tôt, juste après le lancement des Portomenottes. Depuis ce moment-là, Ron savait qu’il devrait forcer son frère à l’accepter comme associé.
« Tu comptes un jour rembourser l’emprunt de départ que tu as eu de Harry ? » avait-il demandé à George le week-end précédent.
« Il ne l’a jamais demandé, » avait répliqué George.
« Il ne le ferait jamais, tu le sais bien, » lui avait répondu Ron avec dédain. « Mais ne t’inquiète pas, je l’ai remboursé à ta place. Maintenant, c’est à moi que tu dois cet argent, George. »
George avait vu le regard dans les yeux de son frère et compris, trop tard, ce qui s’était passé. Il s’était insurgé et avait protesté, mais sans effet. Ron avait revérifié les comptes, trouvé ce qu’il cherchait, et demandé une majorité des parts de l’affaire. George avait contesté, rouspété, tempêté, marchandé, et même fini par en appeler à leurs parents. Après de longues négociations, Ron avait fini par accepter une répartition à parts égales des parts et une association — ce qu’il voulait depuis le début.
Sortant de ses rêveries pleines d’auto-satisfaction, Ron observa de nouveau Harry. Celui-ci fixait toujours le paravent derrière son bureau, le regard dans le vague. Ron ferma les yeux et visualisa le paravent de son ami. Il savait qu’il était beaucoup plus encombré que le sien.
En haut à gauche se trouvait la première photo officielle de Ginny en tant que joueuse des Harpies, prise le jour de sa signature de contrat. Ginny la détestait : elle trouvait qu’elle avait l’air nerveuse. Harry l’adorait : il trouvait qu’elle avait l’air adorable. Ron ne l’aurait jamais admis, mais il savait qu’ils avaient tous les deux raison. Cette photo était l’un des rares sujets de désaccord entre Harry et Ginny.
À côté se trouvait un grand cliché pris lors de la dernière réunion de l’Armée de Dumbledore en octobre passé. L’AD s’était retrouvée dans une salle privée à l’étage du Chaudron Baveur. Harry avait même réussi à convaincre le professeur McGonagall d’autoriser le plus jeune membre, Dennis Creevey, qui était maintenant en sixième année, à quitter l’école pour la journée.
Venait ensuite la photo de Noël des Weasley, la seule que Harry et Ron avaient en commun. En dessous, une seconde photo de Noël, cette fois de Ginny. La sœur de Ron, passablement éméchée, brandissait fièrement une figurine articulée à son effigie. Encore plus bas se trouvait une photo de Ginny à Rhodes. Elle portait un chapeau de paille à large bord, un petit haut à bretelles et une jupe très courte.
Ron réalisa alors que Harry ne regardait pas les photos. Il regardait en dessous, “La Liste”. Comme son ami, Ron connaissait “La Liste” par cœur :
RECHERCHÉS
Par le Bureau des Aurors
En lien avec des événements de la bataille de Poudlard
MANGEMORT
Rabastan Lestrange
ATTENTION : extrêmement dangereux, ne pas approcher.
Contactez immédiatement le Bureau des Aurors.
RAFLEURS CONNUS
Carl Caldecott, Igor Ibbotson, Gordon Payne, Sigbert Scabior, Zachary Youen
ATTENTION : dangereux, ne pas approcher.
Contactez immédiatement le Bureau des Aurors.
AUTRES COMBATTANTS
Miles Bletchley, Millicent Bullstrode, Marcus Flint, Gregory Goyle
ATTENTION : dangereux, ne pas approcher.
Contactez immédiatement le Bureau des Aurors.
Près de deux ans s’étaient écoulés depuis la bataille, et il restait encore dix personnes à retrouver. Harry fixait toujours la liste, mais un sourire sombre apparaissait désormais sur son visage. En voyant l’expression sur le visage de son ami, Ron était certain d’une chose : Harry avait une idée.
Notes:
NDT : Les deux premiers chapitres sont un peu courts, mais les suivants sont parfois très longs. Je ferai de mon mieux pour essayer de garder un rythme hebdomadaire mais à voir si c'est tenable sur le long terme ^^
En tout cas j'espère que ce début vous donnera envie de voir ce qui vient ensuite!
Chapter 2: Interlude : Le Vol Des Pies
Notes:
NDT: Dans ce chapitre, certaines phrases sont prononcées avec un accent écossais. Pour le symboliser dans cette traduction, les phrases dont l’écriture sous-entend un accent écossais sont mises entre *.
Chapter Text
Interlude : Le Vol Des Pies
Harry Transplana au beau milieu du tumulte et du chaos. Ses sens furent momentanément submergés. La pleine lune brillante projetait sans discrimination des ombres fantomatiques sur bruyères, prairies et vasières. Les odeurs âcres d’eau de mer, de poissons et d’oiseaux du Bassin de Montrose prirent d’assaut ses narines. La cacophonie des oies et des mouettes menaçait d’être couverte par des cris de colère.
Éclairées par la lune, Harry aperçut des dizaines de familles rassemblées autour des tables en bois devant le Bar du Bassin. C’était un vieux pub délabré, l’un des repaires favoris des supporters des Pies. Dans la clarté lunaire, la foule prenait des allures irréelles, monochromes. Toutes et tous arboraient des écharpes et des bonnets noirs et blancs ; beaucoup portaient également des robes aux mêmes couleurs. Les flammes magiques bleutées vacillantes qui illuminaient et réchauffaient les tables jetaient des ombres mouvantes sur la scène. Le brouhaha, dedans comme dehors, dérangeait les oiseaux d’eau. Les Moldus ne tarderaient pas à s’en apercevoir, si ce n’était déjà fait.
Avant de quitter l’endroit où il avait Transplané, Harry lança le plus puissant sortilège anti-Transplanage qu’il pouvait. Quiconque voudrait quitter la zone devrait commencer par marcher un mile. Satisfait de son sort, il se mit à courir vers l’auberge, son long manteau noir marquant sa fonction d’Auror flottant derrière lui.
À mesure qu’il approchait, la douleur cuisante de sa poitrine récemment bandée et les élancements dans ses muscles et ses os l’obligèrent à ralentir. La première était une blessure physique ; les seconds, les séquelles des sortilèges Doloris qu’il avait subis dernièrement. Il entendit des pleurs et, oubliant sa propre souffrance, se mit à en chercher la source. Les sanglots venaient de trois enfants, pas plus âgés que dix ans. Leurs visages étaient recouverts par un maléfice de Chauve-Furie, que leurs parents affolés tentaient d’annuler. Jurant entre ses dents, Harry s’approcha des enfants, sortit un petit appareil photo de son manteau, les photographia rapidement, puis, d’un coup de baguette, fit disparaître les sortilèges. Le regard réprobateur de leurs parents fut la confirmation finale : Harry savait désormais avec certitude qui avait lancé ces sorts.
Harry luttait pour garder son calme. Il travaillait sous couverture depuis un mois, et il y avait maintenant de grandes chances que son gibier si longtemps traqué lui échappe à nouveau. La réussite de sa mission reposait dorénavant sur Lavande. Il secoua la tête avec désespoir : il avait été fou de la laisser, mais Lavande avait été si persuasive.
Face à ce qu’il voyait autour de lui, sa mission initiale lui semblait soudain bien secondaire.
Il avait espéré passer ce temps libre obtenu avec difficulté au Terrier, ou mieux encore, au 12, square Grimmaurd, à fêter la dernière victoire des Harpies avec Ginny. Mais il l’avait manquée encore une fois. Quand il était arrivé sur le terrain des Pies, le match était terminé et Ginny était repartie fêter une nouvelle victoire avec deux de ses coéquipières.
Les Harpies étaient désormais presque assurées de remporter le championnat. Leur victoire serrée de ce jour-là contre les Pies de Montrose leur avait donné une avance quasiment impossible à rattraper : 930 points d’avance sur leur plus proche rival, les Tornades de Tutshill, jusque-là indétrônables. Le dernier match de la saison pour les Harpies aurait lieu dans deux semaines, le jour du vingt-deuxième anniversaire de George. Elles joueraient à domicile contre les Canons de Chudley. En cas de victoire, quel que soit le reste des résultats, elles seraient championnes de la Ligue. La journée promettait d’être animée chez les Weasley, surtout pour Ron, puisque les Cannons se disputaient — encore une fois — la dernière place avec les Frelons de Wimbourne.
Les pages sportives de la Gazette du Sorcier attribuaient le succès spectaculaire des Harpies à leurs deux recrues de pré-saison : l’ancienne Poursuiveuse des Monarques de Woollongong (et actuelle Poursuiveuse de l’Équipe Nationale Australienne) Olivia « l’Ange australienne » Aikenhead, 20 ans, et « la sensation adolescente » Ginny Weasley, meilleure marqueuse de la ligue cette année. Grâce à ses performances lors de sa première saison, Ginny avait été sélectionnée pour l’équipe U21 d’Angleterre. Elle participerait probablement à la tournée européenne estivale.
Alors qu’il s’approchait du pub, Harry entendit des cris et des chants en sortir.
« Nous sommes les Harpies, nous sommes les championnes ! » hurlaient plusieurs voix ivres.
Trois membres de la brigade locale de la Justice Magique étaient au-devant de Harry et se rapprochaient rapidement du pub. Avant qu’il n’ait pu dire quoi que ce soit, le sorcier en tête ouvrit la porte… et reçut aussitôt un maléfice de Chauve-Furie en plein visage. Il recula, stupéfait. Harry, d’un geste de baguette, referma la porte et lança aux agents :
« Je m’en occupe. »
La sorcière et le sorcier qui ne s’était pas pris le maléfice cherchèrent l’origine de cet ordre. Le long manteau noir de Harry et ses vêtements Moldus l’identifiaient comme Auror. L’uniforme seul suffit les faire s’arrêter un instant. Puis ils le reconnurent. Sa célébrité non désirée pouvait parfois être utile. L’autre sorcier était encore aux prises avec le maléfice quand Harry les rejoignit et défit le maléfice.
« Merci, » crachota le sorcier.
L’homme lui semblait vaguement familier. Il leva les yeux vers Harry, et procéda au rapide aller-retour familier, mais non moins énervant, vers le front de Harry. Les collègues de l’homme restaient silencieux, à observer l’échange en attendant ses ordres.
« Désolé pour ça, » s’excusa Harry. « Est-ce qu’on se connaît ? »
« *Pas besoin d’vous excuser, monsieur Potter, vous n’êtes pas l’responsable,* » répondit l’homme en se présentant. « *Shérif Hamish Campbell, du bureau d’Édimbourg.* »
Harry le regarda à nouveau. Le nom comme le visage lui étaient familiers. Où l’avait-il rencontré ?
« Moira Campbell, » dit-il soudain au moment où le nom lui revint à l’esprit. Et il s’arrêta, gêné au plus haut point. C’était, il s’en souvenait, un nom gravé sur le mémorial de Poudlard. Il avait aperçu le shérif Campbell à plusieurs cérémonies du souvenir et autres événements.
Le visage de Campbell trahit la surprise et une ombre de chagrin. Le jeune sorcier brun et élancé qui l’accompagnait sembla lui aussi affecté, et Harry réalisa que son visage aussi, était étrangement familier, et qu’il l’avait sans doute déjà croisé lors de ces mêmes commémorations. Il se demanda qui le jeune homme avait perdu, et regarda Campbell avec d’un air désolé.
« Votre femme ? » demanda-t-il prudemment.
Campbell acquiesça, surpris.
Harry détailla le shérif Campbell. C’était un grand sorcier robuste, qui devait avoir environ une dizaine d’années de moins qu’Arthur Weasley. Son visage était balafré par une cicatrice de maléfice et il lui manquait trois doigts à la main gauche.
« Enchanté de vous revoir, shérif Campbell, » dit Harry en lui serrant la main. Il se rendit compte qu’il fixait les doigts manquants au lieu de ses yeux et releva vivement la tête. « Pardon, » ajouta-t-il.
« Tout l’monde regarde, » dit Campbell d’une voix bourrue en agitant sa main. « On s’y fait. »
« Vraiment ? » demanda Harry en frottant la cicatrice en éclair sur son front. « Moi, je ne m’y suis jamais fait. »
« *Bataille de Poudlard,* » expliqua Campbell en désignant sa main. « *La femme Lestrange. J’ai eu d’la chance. Ma femme, pas.* » ajouta-t-il sombrement.
Un fracas retentit à l’intérieur de l’auberge et ramena les deux hommes au présent.
« Ça vous dérange si j’entre seul ? » demanda Harry. « J’aimerais essayer de calmer les choses. »
« *Allez-y, monsieur Potter,* » dit Campbell avec gravité. « *Si vous avez besoin d’aide, on est juste là.* »
« Et puis-je vous demander une autre faveur, à vous et à vos collègues ? » ajouta Harry.
Campbell hocha la tête. « Baillifs Heather Huddleston et Mark Moon, » dit-il en présentant ses deux subordonnés. Huddleston était une petite sorcière âgée, aux cheveux gris métallique et au menton fendu. Moon avait la vingtaine, plutôt quelconque, presque aussi grand et dégingandé que Ron.
« Pourriez-vous commencer à recueillir des témoignages ? » demanda Harry. « J’aimerais particulièrement savoir ce que ces familles ont à dire. » Il désigna les parents des enfants qui avaient subi les maléfices de Chauve-Furie.
« *Aye, on peut faire ça,* » répondit Campbell. « *Vous pensez procéder à des arrestations ?* »
Harry hocha la tête avec gravité et se dirigea vers la porte du pub. Baguette à la main, il tendit la gauche, ouvrit la porte, détourna le maléfice lancé sur lui et pénétra dans la salle.
« Oupsh, » fit Ginny, un grand sourire ivre aux lèvres en voyant son petit ami. « ’Alut, bô goss. »
Harry s’avança à grandes enjambées, baguette levée. Le silence tomba soudainement sur la pièce sans-dessus-dessous.
Chapter 3: La Traque : Chasse au Loup
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La Traque : Chasse au Loup
« Harry », siffla Ron avec impatience, « C’est l’heure d’y aller. On ne veut pas être en retard. »
Harry Potter leva les yeux de son bureau au Bureau des Aurors et adressa un sourire à son ami.
« Toi, tu ne veux pas être en retard ! Hermione n’est en France que depuis dix jours. C’est trop long comme séparation ? » le taquina-t-il. Il posa sa plume. « J’ai fini. Je vais juste déposer mon rapport sur le bureau de Robards et enlever mon uniforme. On peut prendre le métro. Si on marche jusqu’à Embankment, il n’y a que deux arrêts sur Bakerloo Line. »
« On pourrait… »
« Ron », l’interrompit Harry avec fermeté. « La dernière fois qu’on a Transplané jusqu’au restaurant, on a été filmés par deux caméras de sécurité Moldues. On ne recommencera pas ! Je préfère arriver avec quelques minutes de retard plutôt que de devoir remplir toute cette fichue paperasse. »
« Tu sais à quel point je déteste le métro », grommela Ron.
Il était sept heures dix quand Harry et Ron arrivèrent chez Antonio, aux abords de Soho. Ils avaient une réservation régulière dans le restaurant Italien. Une fois toutes les deux semaines, presque sans exception, ils y retrouvaient leurs petites amies respectives. Leur première visite du restaurant remontait aux jours confus et endeuillés qui avaient suivi la Bataille de Poudlard. Malgré les horaires décalés, le travail et les engagements de Quidditch, ce dîner bimensuel était devenu aussi incontournable que les repas du dimanche toutes les deux semaines au Terrier.
Le Terrier était animé, bruyant, fourmillait d’activité et débordait de magie ; leurs repas chez Antonio étaient différents. C’était devenu leur refuge public, un restaurant Moldu au cœur du Londres Moldu, loin des regards indiscrets des sorciers et des intrusions de la presse magique. Harry adorait cet endroit, il adorait le monde Moldu, en grande partie pour l’anonymat bienvenu qu’il lui offrait.
Hermione et Ginny étaient déjà installées à leur table habituelle, dans un coin à l’écart. Deux jeunes hommes élégants leur parlaient.
Un serveur rond et basané se précipita vers eux dès leur entrée. « Vous ne devriez jamais faire attendre de jolies filles », les gronda-t-il. Hermione leur fit un signe de la main en les voyant arriver. Les deux jeunes hommes regardèrent Ron et Harry, sourirent d’un air penaud, puis regagnèrent leur propre table.
« Devrais-je m’inquiéter ? » demanda Harry.
« Le brun était mignon », répondit Ginny alors qu’il se penchait pour l’embrasser. « Il m’a demandé mon numéro de téléphone. Je lui ai donné celui de l’appartement en lui disant que je m’appelais Lynette Baker. » Harry éclata de rire.
Le serveur attendit poliment que les deux couples aient terminé leurs salutations. En tant que clients réguliers aux pourboires généreux, Beppe était celui qui prenait soin d’eux. « Que désirez-vous boire ? » demanda-t-il à ses clients favoris une fois qu’ils avaient fini de s’embrasser.
« Du vin ? » proposa Harry. Ron et Ginny acquiescèrent, mais Hermione secoua la tête.
« Un jus d’orange pour moi, s’il vous plaît, Beppe. »
« Et une bouteille de Bardolino », ajouta Harry.
« Tu es tellement rasoir, Hermione », la réprimanda Ron.
« Je suis fatiguée, et je conduis », répliqua-t-elle. « Et puis je ne bois pas beaucoup, tu le sais bien. Mais ça me rappelle… » Elle se pencha, sortit deux sacs de sous la table et en tendît un à Harry et l’autre à Ginny. « Grand Cru Tokay-Pinot Gris », annonça-t-elle, tandis que Harry guignait dans son sac pour voir la bouteille qu’il contenait. « J’en ai rapporté une demi-douzaine de Strasbourg. Une pour chacun de vous deux, et une chacun pour mes parents. »
Ron prit une mine blessée et tendit les mains avec espoir.
« J’ai mis ta bouteille au frigo avant de partir. Elle doit être servie fraîche », lui dit Hermione. Ron se pencha et déposa un baiser sur la joue de sa petite amie.
« Encore une raison pour laquelle je t’aime, Hermione », dit-il en souriant.
Hermione rayonnait, et Ginny feignit de vomir. Harry éclata de rire.
« Alors, Strasbourg ? » demanda-t-il.
« Bien. Très bien ! On a une première ébauche de déclaration sur les droits des elfes de maison qu’on espère être adoptée dans toute l’Europe. Laurent et moi… »
« Laurent ? » l’interrompit Ron. « Laurent qui ? »
« Le représentant belge », expliqua Hermione. « On a rédigé la version finale de la proposition ensemble. Tu l’aimerais bien. »
« J’en doute », grommela Ron.
« Il est plus petit que Ginny, plus gros que Slughorn, dans les septante ans, et je lui rappelle sa petite-fille préférée, Ron. »
« Peut-être que je l’aimerais bien », rit son petit ami.
Beppe revint avec leurs boissons, servit le vin et prit leurs commandes. La conversation glissa ensuite du voyage d’Hermione au « Conseil Magique pour l’Europe » de Strasbourg vers la prochaine mission de Harry.
« Comment avance la chasse à Lestrange ? » demanda Hermione. « Ron m’a dit que tu faisais des progrès. » Harry hocha la tête.
Rabastan Lestrange était désormais le seul porteur de la Marque des Ténèbres encore introuvable depuis la Bataille de Poudlard. La Gazette du Sorcier lui avait même donné, avec ce besoin pathologique de titres grandiloquents typique du monde sorcier, le surnom de « Dernier Mangemort ». Le deuxième anniversaire de la Bataille était dans deux mois. Dans les mois qui avaient suivi la Bataille, depuis la première compilation des personnes ayant combattu aux côtés de Tom Jédusor, le nombre de noms avait diminué avec régularité. Harry, ses amis et ses collègues Aurors s’en étaient assurés.
« Harry a impliqué les Malefoy », intervint Ginny. « Il a beaucoup avancé pendant ton absence. »
Hermione lança un regard intrigué à Harry.
« Tu sais que les gobelins de Gringotts refusent toujours de parler des coffres dormants », commença Harry. « Ils n’acceptent de traiter qu’avec le propriétaire du coffre ou son héritier. Ça m’a donné une idée. Aucun des Lestrange n’avait de testament — n’en a, dans le cas de Rabastan. Rodolphus est mort le premier, donc son héritage est allé à sa femme… »
« Bellatrix », grogna Ginny.
« Bellatrix », confirma Harry. « Donc la part de Rodolphus de ce qui se trouvait dans le coffre Lestrange — et c’est une sacrée fortune — on l’a vue de près d’ailleurs… »
« Mes amis braqueurs de banques », dit Ginny en riant.
« L’argent de Rodolphus est revenu à Bellatrix. Quand elle est morte à son tour, son argent a été partagé entre ses sœurs, Andromeda et Narcissa. »
« Andromeda en avait certainement besoin, » fit remarquer Hermione. Harry acquiesça.
« Et les Malefoy ont généreusement fait don de la plus grande partie de leur part, » ajouta Ginny avec un sourire vindicatif. « L’héritage de Narcissa a servi à indemniser toutes les victimes tuées, enlevées ou torturées par elle et les Malefoy. Ollivander, Luna, Hermione et bien d’autres ont reçu de généreuses compensations. »
Hermione frémit à ce souvenir, avant de sourire avec amertume.
« Puis Narcissa a donné presque tout le reste à la Société d’Aide aux Nés-Moldus, et placé ce qui restait dans une fiducie pour Teddy, » rappela Ginny, bien que ça ne soit pas vraiment nécessaire.
Harry esquissa un sourire. Il chérissait encore le souvenir de la tête de Lucius Malefoy lorsque sa femme lui avait annoncé ce qu’elle avait fait de la fortune des Lestrange. Après tout, c’était son argent, pas celui de son mari. Narcissa s’était échinée à redorer le blason et les finances de la famille Malefoy. Sa méthode — des dons généreux et un soutien affiché au nouveau régime — fonctionnait. Beaucoup, Harry comprit, doutaient de la sincérité de ce revirement. Dans le cas de Lucius, Harry en était certain : ce n’était pas le cas. Mais Lucius ne tenait plus les rênes de la famille Malefoy ; c’était Narcissa. Et puisqu’elle soutenait financièrement sa sœur Andromeda Tonks, Harry était prêt à leur laisser le bénéfice du doute.
« On n’a aucune idée d’où se cache Lestrange, mais c’est un Sang-Pur. Il n’y a que peu de chances qu’il se réfugie dans le monde Moldu, » reprit Harry. « Sinon, on l’aurait déjà retrouvé. »
« L’argent encore présent dans le coffre Lestrange appartient dans son intégralité à Rabastan. Les gobelins refusaient de nous dire s’il l’utilisait. Mais il n’y a plus d’autre Lestrange ; donc à la mort de Rabastan, son or ira par Rodolphus à Bellatrix, puis à Andromeda et Narcissa.
« On a vu Dromeda et Teddy au Terrier le lendemain de ton départ, Hermione. J’ai parlé à Dromeda, qui a ensuite parlé à Narcissa le soir même. Elles ont toutes deux accepté de me rencontrer le lendemain. Narcissa a accepté d’aller voir les gobelins pour moi, alors on est allés directement à Gringotts, et elle leur a dit qu’elle allait demander à ce que Rodolphus soit déclaré mort. C’était mon idée, pas la sienne ; elle a juste accepté d’en assumer la mauvaise presse. »
« Tant mieux, » cracha Hermione avec venin. Harry haussa les épaules.
« Les Malefoy traversent une mauvaise passe financière, » poursuivit-il.
« Weasley Farces pour Sorciers Facétieux prend de plus en plus de contrats aux Malefoy », dit Ron avec un sourire fier. « On vient de décrocher un autre contrat avec le Ministère qui était à Lucius. »
« Ce sera encore mieux quand on aura attrapé Rodolphus », observa Harry. « Tu pourras démissionner du Bureau des Aurors et travailler à temps plein avec George, au lieu d’essayer de jongler entre les deux. Nev pourra aussi arrêter et enfin retourner à ses serres. »
« Neville et moi avons promis qu’on resterait jusqu’à ce que tu aies complètement terminé la liste. On attrapera l’assassin de Colin », lui rappela Ron.
« Ron », répondit Harry, « si on attrape Lestrange, il ne restera plus que les Rafleurs : Caldecott, Ibbotson, Payne, Scabior et Youen ; et les quatre Serpentards : Bletchley, Bulstrode, Flint et Goyle le meurtrier. Neville est en train de vérifier une rumeur selon laquelle Caldecott et Scabior seraient morts. Si c’est vrai, il ne restera plus que trois Rafleurs et les Serpentards. Ils ne devraient pas être si difficiles à retrouver. »
« On n’a pas vu la moindre trace des Serpentards en presque deux ans », fit remarquer Hermione.
« Comment quelqu’un d’aussi stupide que Goyle peut encore être en cavale ? » se demanda Ron.
« Ils doivent être ensemble », proposa Ginny, fidèle à sa théorie habituelle. « Tu sais que Bletchley est un sang-mêlé, Harry, et le seul avec un peu de cervelle. C’est lui qui cache Flint, Goyle et Bulstrode dans le monde Moldu. »
« Alors, qu’est-ce que Narcissa Malefoy a découvert pour toi ? » demanda Hermione.
« Les gobelins ne lui ont pas dit grand-chose, juste assez pour lui prouver que Rabastan est vivant. Son compte est actif. Des retraits autorisés sont faits de son coffre et l’or est déposé dans celui de quelqu’un qui s’appelle Verulf Lowell. Jusqu’à ce que Narcissa me donne ce nom lundi dernier, on n’en avait jamais entendu parler. Maintenant, on en sait beaucoup à son sujet. » Harry avait l’air sombre.
« C’était un Rafleur, il travaillait aux côtés de Greyback », expliqua Ron. « Tu sais bien que les Rafleurs n’étaient pas encadrés, Hermione ; la plupart n’étaient que des brutes idiotes qui aimaient faire souffrir les gens. Grâce à Jédusor et au Ministère, ils ont trouvé un moyen d’être payés pour ça. Tous ceux qui ont combattu à Poudlard ont été identifiés. La plupart ont été capturés ou tués lors de la Bataille finale. Ceux qui se sont échappés ont tous été identifiés et tracés, sauf les cinq de la liste. On a toujours su qu’il y en avait qui n’avaient pas combattu et qu’on ne les retrouverait sans doute jamais tous. »
« Lowell faisait partie de ceux qui n’étaient pas présents à la Bataille, il n’a donc jamais été sur notre liste », poursuivit Harry. « Quand j’ai découvert le lien avec Greyback, j’ai passé une semaine à relire les anciens rapports de Remus pour l’Ordre. »
« Il est obsédé depuis ton départ », expliqua Ginny à Hermione. « Il travaille tard, saute des repas, est globalement… »
« Harry », compléta Ron. « Tu savais déjà comment il était, bien avant de commencer à sortir avec lui ! »
Harry fit un clin d’œil à Ginny et ignora l’interruption. Tous les autres avaient terminé leurs assiettes, mais il avait tellement parlé qu’il n’avait mangé que la moitié de la sienne.
« Lowell est un autre loup-garou, et probablement ce qui se rapproche le plus d’un ami que Greyback n’ait jamais eu. Je crois que c’était l’un des Rafleurs que Bellatrix a attaqués quand on s’est échappés du manoir Malefoy. Narcissa et Drago sont du même avis. Je suis allé à Azkaban pour essayer de parler à Greyback, mais il est… »
« Enragé ? » suggéra Ginny avec acidité.
« J’allais dire peu coopératif. » Harry sourit en terminant son Pollo alla Cacciatore et plaça soigneusement ses couverts sur l’assiette. « Heureusement, grâce aux rapports de Remus, j’ai localisé Lowell… enfin presque. J’ai découvert que malgré toute sa manie de la pureté du sang, et contrairement à sa belle-sœur, Rabastan était presque ami avec Greyback et sa meute. »
« Ils ont un intérêt commun : faire souffrir les autres », observa Ginny.
« Alors le Bureau des Aurors a le devoir de les arrêter avant qu’ils ne fassent d’autres victimes », dit Harry calmement.
« Lowell vient d’un village de loups-garous dans le nord, juste à la frontière de l’Écosse », expliqua Harry à Hermione. « Le village s’appelle Shivering Stone. Malheureusement, personne au Ministère ne sait où il se trouve. On sait seulement qu’il est quelque part dans une zone d’environ mille deux cents kilomètres carrés. Dans cette zone se trouve un sortilège anti-Transplanage couvrant une superficie de plus de quarante kilomètres de diamètre. Il a été posé il y a plus d’un siècle pour tenter de maintenir les loups-garous au même endroit, même si peu d’entre eux savent Transplaner. Donc demain, je pars à la recherche de ce village mystérieux, perdu dans les landes. Je pense être absent au moins deux semaines. »
La conversation s’interrompit quand Beppe arriva pour débarrasser les assiettes et prendre leur commande de desserts.
Au dessert, Hermione bombarda Harry de questions et lui réexpliqua les différentes méthodes de repérage des lieux magiquement dissimulés, qu’il connaissait pour la plupart déjà. Il avait la tête qui tournait quand ils quittèrent le restaurant, montèrent dans la Mini d’Hermione et furent raccompagnés au square Grimmaurd.
« Est-ce que vous venez prendre un café ? » proposa Harry en aidant Ginny à descendre de la banquette arrière. Ron regarda Hermione, qui lui sourit et secoua la tête.
« Ma petite amie a laissé mon cadeau dans son frigo », dit-il. « Je passe chez elle le récupérer. »
« Donc tu rentreras très tard », dit Harry.
« Moi, je reste pour un café », annonça Ginny à son frère, tout sourire. « Mais je dormirai chez Hermione, bien sûr. »
Molly Weasley essayait de garder un œil sur ses enfants, même si tous avaient quitté la maison. Ron, en théorie du moins, vivait au Square Grimmaurd avec Harry. En pratique, il passait la plupart de son temps dans l’appartement qu’Hermione avait acheté à Chelsea, au bord de la Tamise grâce à l’argent des compensations de Malefoy. Ginny partageait un appartement dans le village de Menai Bridge avec ses coéquipières Olivia Aikenhead et Lynette Baker, même si elle passait deux ou trois nuits par semaine au Square Grimmaurd. Après avoir ainsi établi leurs alibis, Harry et Ginny regardèrent la Mini s’éloigner.
« Je suis sûre que Maman sait très bien ce qu’on fait, tu sais », déclara Ginny en regardant la Mini disparaître au coin de la rue. « Elle ne veut juste pas que Papa le découvre. »
« Ton père sait. Il sait tout, et il ne dit rien », affirma Harry.
Ginny renifla d’un air sceptique. C’était un sujet qu’ils avaient déjà trop souvent débattu et sur lequel ils n’étaient jamais d’accord.
Ils entrèrent dans la maison de Harry et descendirent à la cuisine, où Kreattur leur avait laissé du café. Pendant quelques instants, ils burent en silence, se contentant de se regarder et de sourire.
« Pourquoi faut-il que ce soit toi, Harry ? » demanda Ginny, rompant le silence complice. « Robards ne pourrait-il pas envoyer quelqu’un d’autre ? »
Elle posa sa tasse vide, se pencha par-dessus la table de bois rutilante et prit les mains de son petit ami dans les siennes.
« Ginny, tu sais comment ça fonctionne. J’ai trouvé la première piste et je l’ai suivie. C’est le protocole du Bureau des Aurors. C’est à moi de poursuivre l’enquête jusqu’à ce que j’aie quelque chose de concret. C’est comme ça que ça marche : les enquêtes se mènent en solo, et pour les opérations, il y a toujours au minimum deux équipes de trois », expliqua-t-il.
« Donc tu vas t’aventurer dans les landes, à la recherche d’un village de loups-garous, sans pouvoir Transplaner pour te sortir de là s’il le faut. Je ne te verrai pas, je n’aurai pas de nouvelles pendant des jours, des semaines peut-être », dit Ginny. « Je ne saurai pas si tu es en sécurité. »
« J’aurai une plume à copie ; je serai en contact avec le Bureau. Ron, Nev, Susan et Terry sauront ce qui se passe, et Ron en informera Hermione. Ils ont tous promis de te transmettre des messages. »
« Mais des loups-garous, Harry ! » protesta Ginny.
« Remus était un loup-garou », fit remarquer Harry calmement.
« Greyback aussi », rétorqua Ginny, « et regarde ce qui est arrivé à Bill ! Regarde la pauvre Lavande : presque deux ans en fauteuil roulant, toujours dans une douleur constante, et sans espoir de guérison, d’après les guérisseurs ! »
Harry fronça les sourcils. Il comprenait l’angoisse de sa petite amie ; ce n’était pas une mission comme les autres. Il en avait déjà accompli de dangereuses depuis sa qualification, mais celle-ci était différente : risque de cicatrices comme Bill, de blessure grave comme Lavande, ou même de contamination. Il tenta d’en plaisanter.
« Ça fait bien deux ans que je n’ai pas eu une nouvelle cicatrice », fit-il remarquer en grattant distraitement la zone au-dessus de son cœur.
« S’il te plaît, Harry, ne plaisante pas. »
« Désolé, Ginny. » Harry parlait avec sincérité, plongeant dans les yeux bruns inquiets de sa petite amie. « Mais essaie de comprendre… J’ai fait tout le travail préliminaire. C’est mon plan, mon affaire. Qu’est-ce que je peux faire d’autre ? Demander à Ron, ou à Neville ?
« Ron », dit-il, mimant une conversation imaginaire avec son ami absent, « je crois que Rabastan Lestrange est en contact avec une meute de loups-garous ; il les paie certainement pour quelque chose. Ça t’ennuierait d’aller dans une zone sauvage immense pour localiser leur village et vérifier s’ils l’hébergent ? » Harry observa attentivement Ginny. « Neville le ferait si je lui demandais. En fait, il s’est proposé, mais je ne peux pas le laisser faire, pas quand il s’agit de Lestrange. Il est d’ordinaire très prudent et réfléchi, l’Auror parfait, mais… »
Ginny soupira et hocha la tête. Elle savait que Harry avait raison, mais elle ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter pour lui.
« Pourquoi ne pas simplement lancer un raid ? » tenta-t-elle encore.
« Parce que nous ne saurions pas où le lancer. On le fera, Ginny, dès qu’on sera certains que Lestrange s’y trouve. Quand je l’aurai localisé, le Bureau des Portoloins préparera des Portocartes pour faire passer une escouade d’Aurors au-delà du sortilège anti-Transplanage. Je sais que tu vas t’inquiéter, mais je serai prudent, très prudent. Je suis un Auror, Ginny ; mon travail est d’arrêter les mages noirs. Si tu le veux, je démissionnerai après cette mission. »
« Si tu démissionnes », s’enflamma soudain Ginny, « tu le regretteras, et ce sera ma faute ! J’ai toujours su qu’il y aurait des jours comme celui-là. Tu es courageux, têtu, et tu n’abandonnes jamais, Harry, jamais ! C’est une des raisons pour lesquelles je t’aime. » Elle sourit tristement en plongeant son regard dans ses yeux verts étincelants.
« Je veux te voir soulever la Coupe de la Ligue dès ta première saison », dit-il, comprenant que la discussion était close, que Ginny avait accepté son départ. « Et je veux voir la fille que j’aime jouer pour l’Angleterre. »
Il se leva, se pencha au-dessus de la table et déposa un baiser léger sur son front. Ginny se leva aussitôt, agrippa ses épaules, tira et le fit pivoter. Sans résister, il se laissa doucement allonger sur la table. Étendu sur le dos, il leva les yeux vers elle. Elle s’était trouvée assise en face de lui ; à présent, elle apparaissait comme à l’envers. Couché sur le dos sur sa table de cuisine, il leva les yeux vers elle. Elle s’était installée en face de lui à leur arrivée, elle lui apparaissait donc à l’envers. Elle se pencha, sa chevelure en cascade formant un rideau de feu autour de sa tête. Elle l’embrassa sur le nez ; il admira son cou constellé de taches de rousseur. Elle l’embrassa sur le menton ; il leva les yeux vers son décolleté décoré de ces mêmes taches. Enfin, elle l’embrassa vraiment. Son menton effleurait le bout de son nez tandis qu’ils partageaient un long baiser inversé, chacun mordillant avec avidité la lèvre inférieure de l’autre.
Finalement, Ginny se redressa. « Peut-être que je ferais bien de te rappeler exactement pourquoi tu as intérêt à revenir entier, Potter », chuchota-t-elle. Elle grimpa sur la table, pivota et s’assit à califourchon sur son abdomen.
« Je devrais peut-être demander à Kreattur de quitter la cuisine », répondit Harry en l’attirant à lui pour un nouveau baiser.
« Sois prudent », lui dit Ginny le lendemain matin, après avoir avalé sa dernière bouchée de toast à la marmelade. « Rentre vite, et rentre sain et sauf. »
« Je ferai de mon mieux », répondit Harry. « Bon entraînement, et ne fais rien de stupide. »
« Je suis une fille raisonnable à l’entraînement », le rassura-t-elle. « Je ne me casse des os que pendant les matchs. Mais je vais rater mon baiser d’échauffement d’avant-match. Je ferais mieux de le prendre maintenant. »
Elle l’embrassa passionnément, une main plongée dans ses cheveux en bataille, l’autre serrant fermement ses fesses. Harry sentit la marmelade sur sa langue et tenta de prolonger le baiser, mais elle se dégagea de son étreinte et lança :
« Souviens-toi, ça, c’est à moi ! » Elle lui serra une fois les fesses. « Prends-en soin. »
Plongeant la main dans le pot sur la cheminée, elle lança une pincée de poudre de Cheminette dans le feu de la cuisine, dit : « Terrain d’entraînement des Harpies, Holyhead » et disparut dans les flammes vertes.
« Je risque d’être absent quelques semaines, Kreattur », dit Harry à son elfe de maison. « Je ne peux pas te dire quand je serai de retour, désolé. »
« Maître, » acquiesça Kreattur d’un signe de tête. Harry enfila son manteau noir d’Auror, vérifia que sa cravate grise était bien droite, et jeta à son tour de la poudre de Cheminette dans l’âtre.
« Ministère de la Magie », dit-il.
Harry traversa l’Atrium d’un pas décidé en direction des arches de sécurité. C’étaient une autre de ces inventions signées Weasley Farces pour Sorciers Facétieux. Lui, Ron, George, Hermione, Ginny et Percy avaient consacré de longues soirées à essayer de mettre au point une nouvelle version de la Carte du Maraudeur. L’entreprise s’était révélée impossible, jusqu’à ce que Harry découvre dans son coffre de vieilles notes de son père et de Sirius. Cela l’avait conduit à Andromeda Tonks, qui possédait de nombreux papiers et documents ayant appartenu à Remus Lupin. Ces arches de sécurité en étaient le résultat final.
Le personnel de sécurité disposait d’une carte de l’Atrium indiquant le nom de chaque personne traversant la zone. La carte affichait également le nom prononcé en franchissant l’une des arches. Les deux noms devaient toujours correspondre. Le système, simple, mais efficace, avait déjà permis d’interpeller plusieurs individus depuis son installation quelques mois plus tôt. Les personnes Invisibles apparaissaient immédiatement sur la carte et étaient piégées en franchissant une arche sans parler. Ceux qui utilisaient du Polynectar donnaient presque toujours le mauvais nom. Certains étaient des journalistes, mais pendant les vacances de Noël, la plupart s’étaient révélés être de jeunes chasseurs d’autographes à la recherche de Harry – pour le plus grand amusement de Ron.
« Harry James Potter », déclara Harry en franchissant une arche au milieu du bourdonnement des employés du Ministère, avant de se diriger rapidement vers un ascenseur. Il sortit sa vieille montre de poche cabossée : neuf heures moins dix. Sa réunion de préparation avec le Chef des Aurors, Gawain Robards, avait lieu dans dix minutes.
Lorsque Harry entra dans la salle de réunion, Robards et Neville Londubat étaient déjà présents. Ils furent rejoints peu après par Ron, Dominic Strang, Susan Bones, Terry Boot et l’Auror senior Aubrey Williamson.
Les Aurors travaillaient par équipes de trois, et l’équipe de Dominic fournirait un soutien si nécessaire. En théorie, toutes les équipes devaient être composées d’Aurors pleinement qualifiés, mais les Mangemorts avait bouleversé ces règles. Après la Bataille de Poudlard, le Bureau des Aurors fonctionnait à moins de la moitié de ses effectifs. Même en envoyant tous les apprentis sur le terrain, ils n’avaient toujours pas atteint les trois quarts des effectifs. Harry, lui, avait été qualifié à peine deux mois plus tôt – en la moitié de la durée habituelle, un temps record. Neville, Ron, Susan et Terry devaient passer leurs examens finaux dans trois mois, une année plus tôt que prévu.
L’été précédent, vingt candidats s’étaient présentés. Kingsley parlait de « l’effet Potter », mais seuls quatre avaient réussi les tests préliminaires. Ces quatre-là participaient désormais au nouveau programme intensif de deux ans.
L’équipe de Harry était composée de Neville et Ron. Susan et Terry travaillaient avec Strang, un homme trapu particulièrement fier de son bouc noir et soigné. Malheureusement, cette tentative de dissimuler son menton fuyant ne faisait qu’y attirer l’attention. Les six étaient tous supervisés par Williamson, Auror chevronné à la queue-de-cheval, également responsable de deux autres escouades.
Harry exposa brièvement ses propositions devant ses patrons, collègues et amis. Robards, penché en avant, sa barbe courte appuyée sur sa canne, écoutait attentivement Harry expliquer ce qu’il avait découvert.
« Je n’ai qu’une vague idée de l’emplacement du village de loups-garous, Shivering Stone. Malheureusement, bien que Dumbledore et Lupin le connaissaient, ils n’ont laissé aucune instruction sur la façon d’y accéder. Tout ce que je sais, c’est qu’il se trouve dans une région appelée Monts Cheviot. Il y a un sentier Moldu, le Pennine Way, qui traverse le comté du Derbyshire jusqu’à la frontière écossaise. Je me suis acheté du matériel de randonnée Moldu le week-end dernier. Mon plan est de commencer en Écosse, à Kirk Yetholm, juste au bord du sortilège anti-Apparition, et de marcher en spirale dans le sens horaire. Je ferai semblant d’être un randonneur. »
« Un quoi ? » demanda Ron.
« Un randonneur », expliqua Harry. « Certains Moldus font de longues marches ou randonnées, dans des coins reculés. Et d’après ce que j’ai vu, peu d’endroits sont plus reculés que celui-là. Selon les notes de Remus, le village est caché magiquement, il ne sera donc pas facile à trouver. J’espère y parvenir en quelques semaines, mais cela pourrait prendre un mois, ou plus.
J’enverrai des rapports réguliers par plume-copie. Je donnerai mon emplacement et un rapport toutes les douze heures, à neuf heures du matin et à neuf heures du soir. Si je manque deux contacts, considérez que je suis en difficulté. Une fois que j’aurai trouvé l’endroit, il n’y aura pas de plan prédéfini : j’aviserai selon ce que je verrai. Des questions ? »
Un silence accueillit ses mots.
« Tu comptes essayer les nouvelles cartes-Portoloins si tu trouves Lestrange ? » demanda Susan.
« Oui », acquiesça Harry, remarquant du coin de l’œil son supérieur lever les yeux au ciel avec dépit. « Le Bureau des Portoloins peut activer à distance nouvelles cartes d’Auror – les Portocartes – et les relier toutes à l’emplacement d’une seule carte. » Tout le monde connaissait déjà la procédure, mais Harry le répétait pour le bénéfice de Robards, qui demeurait sceptique quant à l’utilité de ces cartes. « Cela pourrait être notre première véritable “alerte générale” des Aurors. »
« Oui, eh bien… nous verrons », grogna Robards. « Vérifions ta plume avant ton départ, Potter. »
Il tendit un petit morceau de parchemin à Harry. Celui-ci sortit une plume de corbeau et écrivit :
“Rapport de test 9 h 30. Harry Potter.”
Les six Aurors et leurs supérieurs retournèrent dans le bureau principal. Après avoir souhaité bonne chance à Harry, Williamson les laissa vérifier la plume-copie. Neville et Ron rejoignirent leurs bureaux, les autres sur leurs talons. Ils commencèrent par le plus proche, celui de Ron. Une photo d’Hermione bronzée et vêtue d’un débardeur et d’un short, sourit à l’arrivée de Ron. Sur le bureau reposait une pile de parchemins avec une plume de corbeau : le message de Harry s’y était déjà copié. Ils contournèrent ensuite le Filet du Diable en pot de Neville pour vérifier sa copie.
Robards regarda ses jeunes recrues.
« Vous avez organisé vos tours de garde, n’est-ce pas ? demanda-t-il. L’un de vous doit toujours être présent pour recevoir les messages. »
« Oui, monsieur, répondit Neville. Je prends les soirées et les week-ends. Ron assure les matinées et couvre le lundi et le mardi. »
« Dominic, Susan et Michael prendront le relais quand nous serons absents tous les deux, ajouta Ron. Et Fenella Gray s’est portée volontaire pour nous remplacer si nous sommes tous occupés. Elle recevra directement les photos que Harry prendra, pour autant que son appareil photo à distance fonctionne correctement. »
Robards grogna, sans réel enthousiasme. Il n’aimait pas ces idées farfelues que ses jeunes recrues introduisaient. Des Portomenottes ! Les cartes-Portoloins étaient la prochaine nouveauté et pouvaient, il devait l’admettre en son for intérieur, se révéler utiles. Mais l’appareil photo ? C’était une idée de la petite Gray, encore non évaluée sérieusement. À quoi cela pouvait-il bien servir qu’un cliché pris par Potter soit immédiatement traité ici par Gray ? Et d’ailleurs, elle n’était même pas dans son service. Elle faisait partie des seize candidats et candidates qui avaient échoué aux tests d’entrée des Aurors l’été dernier. Et c’était la fille d’Abraxus Gray ! Il devait absolument le rappeler à ces gamins.
« La fille Gray n’est qu’une simple employée au Bureau de Gestion du Réseau de Poudres de Cheminette », commença-t-il.
« J’ai obtenu une mise à disposition temporaire auprès de Mme Edgecomble », répondit Harry. « Fenella fait partie de notre bureau jusqu’à mon retour. »
« Bien… très bien », grogna Gawain Robards.
Il avait depuis longtemps compris qu’il était impossible de contrôler Potter. Si ce garçon estimait qu’une chose devait être faite, il la faisait sans se soucier des procédures. Ces nouveaux uniformes de style Moldu étaient un autre de ces changements inutiles. Pratiques et efficaces, aussi bien dans le monde sorcier que Moldu, d’après Potter et Weasley. Les manteaux renforcés contre les sortilèges s’étaient montrés utiles, mais un pantalon noir, une chemise blanche et une cravate grise plutôt que des robes ? Ridicule ! Quant à la jeune Bones, elle portait même une jupe ! Une jupe qui montrait ses genoux ! Sa tante Amélia n’aurait pas approuvé cela, Robards en était certain. Et voilà maintenant qu’ils essayaient de le convaincre d’accepter un portefeuille doté d’un sortilège d’extension indétectable ! Mais Potter restait un foutu bon Auror, et Robards le savait, il était virtuellement intouchable. Toujours en maugréant pour lui-même, il tapota l’épaule du garçon.
« Bonne chance, Potter. Si vous avez des ennuis, donnez l’alerte, et tous les Aurors disponibles seront à vos côtés. Je serai dans mon bureau si vous avez besoin de moi. »
Sur ces mots, le vieux Chef du Bureau des Aurors s’éloigna en boitant vers son vaste bureau au fond de la pièce, sa canne martelant le sol à chaque pas.
Harry observa Robards regagner son bureau. C’était un homme bien, mais plutôt figé dans ses habitudes. Il attendit que la porte se referme derrière lui avant de parler.
« Tiens, c’est pour toi », dit Harry à Ron en sortant un paquet et une carte de sa poche. « À n’ouvrir que le jour de ton anniversaire. On dirait que je vais manquer ton vingtième. »
« Merci, Harry, répondit Ron. Pourquoi tu ne l’as pas laissé à Ginny ? »
« On était… » Harry hésita, « … Un peu en retard pour se lever ce matin, et j’ai oublié. »
« Je promets de ne pas l’ouvrir avant mon anniversaire, » ricana Ron. « Bonne chance, mon vieux, et sois prudent. Hermione m’a dit de te rappeler que si les choses tournent vraiment mal, tu dois utiliser ta Gallion. »
« Bonne idée, » dit Harry en agitant la plume de corbeau. « Avec cette plume, je peux convoquer une escouade d’Aurors. Mais si ça ne suffit pas, je peux obtenir, » ajouta-t-il en comptant sur ses doigts, « notre fonctionnaire préférée du Département de contrôle des créatures magiques, la plus belle joueuse de Quidditch du monde, deux zoologistes, deux apprentis Langue-de-Plomb, un animateur radio et sa productrice, une travailleuse caritative, une apprentie guérisseuse, un apprenti fabricant de baguettes, un fermier, divers commerçants, commis et employés de boutique, un dernier écolier… et même une serveuse pour voler à mon secours. »
« Ce n’est pas une serveuse, c’est une apprentie tenancière de pub, » corrigea Neville d’un ton sec.
« Apprentie tenancière de pub ! », dit Harry avec un large sourire. « Tu passes beaucoup de temps à discuter de ses choix de carrière, pas vrai, Nev ? »
Neville vit l’étincelle dans les yeux de Harry et comprit qu’il se faisait taquiner. « Qui te l’a dit ? » demanda-t-il.
« Ginny vous a vu en train de vous embrasser assez passionnément dans la cuisine à notre fête du Millénaire, » répondit Harry avec un sourire. « Après ça, vous êtes restés très discrets tous les deux. Ginny était convaincue que vous sortiez ensemble, mais que vous le cachiez. Tu n’es plus venu nous voir aussi souvent qu’avant, Nev, alors c’était un pari peu risqué de dire que tu avais trouvé une nouvelle fille. »
« Alors, tu sors avec Hannah, hein, Nev ? » sourit Ron. « Elle est bien mieux que Romilda ; elle était complètement cinglée ! Et ça explique pourquoi tu adores les horaires tardifs, aussi. Comme ça tu bosses quand elle travaille. Je commençais à croire que tu étais un buveur en cachette, à filer au pub tout seul dans la journée, mais en fait, tu rejoignais Hannah. »
Neville hocha la tête.
« Bien joué, mon vieux, » dit Ron. « Elle a quand même de sacrés atouts de serveuse. »
« Purée, Ron ! » s’étrangla Harry en voyant Neville rougir.
« Je ne sais vraiment pas ce qu’Hermione te trouve, Ron », ajouta Terry en essayant de ne pas rire. Susan, elle, pinça les lèvres en un silence désapprobateur.
« Ben… c’est vrai quoi, » dit Ron sur la défensive. « Ne me dis pas que tu n’as pas remarqué, Harry. Tu es encore un mec, non ? Ginny ne t’a rien coupé ? »
Harry éclata de rire et secoua la tête, incrédule.
« Toujours aussi délicat, mon vieux. Tu vas me manquer. À bientôt, quand je rentrerai. »
Dominic, Susan et Terry lui firent leurs adieux et retournèrent à leurs bureaux.
« Avant que tu partes, tu crois que ça vaut le coup qu’on jette un œil à ça ? » demanda Ron.
Il sortit une brochure de sa poche et la montra à Harry. Sur la couverture figurait un crâne humain souriant aux cheveux de serpents, la langue tirée. Au-dessus, on lisait : Thés Nèbres de Marque ! Pour tous vos besoins magiques.
« Je doute que les partisans de Jédusor choisissent un nom aussi évident, » dit Harry en souriant. « Qu’est-ce qu’ils vendent ? »
« Des posters, des t-shirts, des philtres d’amour et d’autres trucs, » répondit Ron. « Et du jus de citrouille qu’ils prétendent aussi fort qu’un double whisky pur feu. »
« Hannah a convaincu Tom d’arrêter d’en vendre, » dit Neville. « Ça avait exactement le goût du jus de citrouille ordinaire. Certains jeunes sorciers essayaient d’en donner à leurs copines sans leur dire ce que c’était. »
« Je pourrais tenter ça avec Hermione, » dit Ron, impressionné. « Ça pourrait être une bonne blague. »
« Ou bien elle pourrait te tuer, » l’avertit Harry. « Il n’y a probablement rien derrière tout ça, mais vérifiez quand même si vous voulez. Il est temps pour moi d’y aller. J’ai un Portoloin prévu à dix heures. » Il consulta sa montre. « Donnes de mes nouvelles à Ginny, d’accord ? Et dis à ta mère que ses dîners du dimanche vont me manquer, Ron. »
Sur cette dernière remarque, Harry quitta précipitamment le bureau des Aurors, suivi des adieux et encouragements de ses amis.
Il enfila ses vêtements de randonnée Moldus, prit le sac à dos qu’il avait préparé la veille et se hâta de récupérer son Portoloin. Jusqu’à ce qu’il trouve le village des loups-garous, et sans doute encore plus longtemps, Harry serait seul et sans contact. Rabastan Lestrange, le dernier Mangemort encore en liberté, celui dont la liberté empêchait ses amis de tourner la page, était dans sa ligne de mire. Cette fois, il l’attraperait. Quel qu’en soit le prix.
Chapter 4: Le Collet : Des Nouvelles des Pies
Notes:
NDT : J'ai vu dans les commentaires de la version originale que certaines personnes étaient un peu perdues avec les sauts entre les deux temporalité de cette histoire. Les titres devraient aider à s'y retrouver ! Dans tous les cas bonne lecture :)
Chapter Text
Le Collet : Des Nouvelles des Pies
Harry balaya rapidement la pièce du regard. L’espace d’un instant, un silence absolu et évaluateur tomba sur la salle.
Accoudés au comptoir se trouvaient une bonne vingtaine de jeunes sorciers et sorcières. Toutes et tous portaient des écharpes des Harpies et beaucoup arboraient des robes à leurs couleurs. Ils buvaient à la bouteille et observaient les trois jeunes femmes debout au centre de la pièce.
Les trois sorcières portaient trop de maquillage et montraient trop de peau. Toutes tenaient leur baguette à la main. Ginny, la plus petite d’un cheveu, se tenait entre Olivia Aikenhead, la brune, plus grande d’à peine quelques centimètres, et Lynette Baker, la batteuse remplaçante de vingt-cinq ans avec qui les deux nouvelles recrues partageaient un appartement. Lynette dominait les autres de toute sa hauteur ; elle faisait la taille de Harry et avait de la carrure.
Livy, Linny et Ginny, les « Terreurs des Harpies », comme la presse avait commencé à les appeler, avaient pris du bon temps — encore une fois. Livy et Linny tenaient chacune une chope d’hydromel, tandis que Ginny serrait une demi-bouteille de whisky pur feu. Autour du trio, plusieurs tables et chaises brisées jonchaient le sol. Les supporters des Pies de Montrose encore à l’intérieur du bar se tassaient aux tables, bien à l’écart des joueuses et des fans des Harpies. Certains des locaux étaient à terre, luttant contre un maléfice de Chauve-Furie ; d’autres avaient subi un sortilège de danse endiablée.
« On a gagné », gloussa Ginny.
Harry la regarda avec horreur. Elle tenait à peine debout. Avant qu’il ne puisse parler, un mouvement sur le côté de la pièce attira son attention. Une fillette d’au plus dix ans, une jeune supportrice des Pies, se dirigeait vers la porte.
« Tu restes où tu es, vermine », ordonna Lynette Baker en rugissant, « Tarantallegra ! ».
D’un geste fluide, Harry dévia le sort, qui alla fracasser un miroir derrière le bar. Il enchaîna d’un maléfice du Saucisson sur Linny. Elle tomba au sol, les bras collés au corps. Grimaçant sous la douleur à son flanc due à ces mouvements brusques, Harry regretta de n’avoir pas eu l’occasion de se reposer quelques heures.
« Bâtard », lui cria Ginny. C’était un mot qu’il ne lui avait jamais entendu employer. Les Harpies avaient une mauvaise influence.
« Orphelin, plutôt », la corrigea-t-il avec colère, tout en lançant un sort de bouclier autour des trois Harpies. Ginny lâcha une farandole de jurons. Plusieurs supporters des Harpies alignés au comptoir commencèrent à lever leur baguette.
« Non ! » ordonna-t-il en faisant pivoter sa baguette dans leur direction. La plupart obéirent ; deux ne le firent pas.
Les Stupéfixions informulées de Harry projetèrent les deux jeunes sorciers par-dessus le bar avant qu’aucun n’ait eu le temps de lancer un sort. Livy et Ginny continuèrent à invectiver Harry.
« Oh, taisez-vous ! » cria-t-il, jetant une variante de l’Assurdiato qu’il avait travaillée : elle étouffait la voix des Harpies ivres, mais leur permettait d’entendre ce qui se disait. Il s’adressa ensuite aux supporters restants des Harpies.
« Plus personne ne subit de sort », annonça-t-il. Le « sinon » resta implicite, mais était rendu évident par la fureur dans ses yeux. « Je vous convoque toutes et tous pour trouble à l’ordre public. » Il y eut quelques murmures de rébellion parmi les fans des Harpies, mais aucune baguette ne fut levée. Il parcourut le groupe du regard et ajouta : « Si quelqu’un ne veut pas accepter une convocation, dites-le-moi, et je vous arrête à la place. » Le silence retomba. Harry fit le tour du bar, leva les maléfices et sortilèges sur les fans des Pies, les rassurant et demandant le calme.
Lorsqu’il eut terminé, il s’avança le long du comptoir à la recherche d’un endroit épargné par l’hydromel, la Bièraubeurre et le whisky pur feu renversés. Choisissant l’endroit le plus sec, il sortit de son manteau une plume, un parchemin et une grosse liasse de cartes. Il posa le parchemin sur le bar et effleura la plume de sa baguette qui se mit à flotter au-dessus de la page, prête à écrire. Il fit signe au premier fan des Harpies d’avancer.
« Nom ? » demanda-t-il.
« John Smith », dit effrontément le jeune sorcier, lorgnant Harry. « De sacrés nichons, ta copine, hein ? »
Harry serra la mâchoire, mais ne répondit pas. Il regarda la plume. Elle n’avait pas bougé.
« Plume en panne ? » ricana le sorcier d’un air lubrique. « C’est pour ça que ta nana sort s’amuser ? »
« La plume marche très bien », répliqua Harry, se retenant tant bien que mal de jeter un sort au jeune homme, ou au moins de lui coller son poing. « Retournez en fin de file, on réessaiera. »
Il fit signe à une jeune sorcière d’avancer.
« Jane Smith », dit-elle gaiement. Une fois de plus, la plume demeura immobile.
« Fin de file, et essayez de vous souvenir de votre vrai nom », soupira Harry.
La même chose se produisit avec les deux sorciers suivants.
« Grenville Paylor », déclara le cinquième. La plume de Harry griffonna son nom sur le parchemin.
« Homme sensé, Grenville », dit Harry. « Trouble à l’ordre public. Vous êtes convoqué devant le Justiciar aux assises d’Édimbourg à quatorze heures, samedi 1ᵉʳ avril. »
Le visage de Grenville se décomposa ; des protestations fusèrent du côté des supporters des Harpies, des acclamations montèrent du côté des fans des Pies, et un éclair jaillit derrière Harry. Quelqu’un, Olivia Aikenhead, supposa-t-il, avait essayé de dissiper son bouclier et échoué. Cela ne surprit pas Harry. Seuls Ron, Hermione et Neville y étaient déjà parvenus, et il leur avait fallu près d’une demi-heure. À l’horreur d’Hermione, Neville avait été le plus rapide.
Harry s’attendait aux protestations des fans des Harpies. La date et l’heure de la convocation feraient rater à Grenville le dernier match de la saison. Il regarda le jeune sorcier.
« Voulez-vous vraiment que je change la date ? » demanda-t-il calmement. Le jeune homme vit le feu vert dans les yeux de Harry et secoua la tête, acceptant docilement la carte de convocation.
« Bien. Rentrez chez vous maintenant », ordonna Harry. Grenville quitta le bar, abattu.
La sorcière suivante était très ivre. Elle donna, elle aussi, son vrai nom. Quand Harry la convoqua au même jour, elle plongea son regard dans le sien avec ce qu’elle pensait manifestement être un air séduisant. Son haleine de Bièraubeurre éventée annihilait tout le peu de charme qu’elle avait.
« Vous pourriez changer la date, rien que pour moi ? » minauda-t-elle.
Harry la toisa froidement. « Bien sûr », dit-il. « Même heure le samedi suivant, le huit. » Les fans des Harpies étaient outrés : c’était la date de la demi-finale de la Coupe d’Europe : Harpies de Holyhead contre les Tapesouafles de Quiberon. La jeune sorcière ouvrit la bouche pour protester, mais ne lâcha qu’un énorme rot. Devant l’expression de dégoût de Harry, elle renonça à parler.
Il lui tendit la carte de convocation, et elle s’en alla.
Les autres donnèrent leur nom calmement et acceptèrent leurs convocations.
Finalement, « John Smith » se retrouva devant Harry pour la deuxième fois.
« Une autre répartie ? » demanda Harry. Le jeune sorcier secoua la tête.
« Votre vrai nom ? » reprit Harry. Cette fois, la plume écrivit le nom annoncé. Le jeune homme ne protesta pas quand Harry émit deux convocations distinctes, une pour chacun des samedis, ajoutant au chef initial le délit de refus de fournir son identité à un officier de la loi.
« Jane Smith » voulut plaider.
« Vous auriez pu le convoquer pour les deux délits le même jour », s’emporta-t-elle.
« Et vous auriez pu me donner vos bons renseignements du premier coup », répondit posément Harry en lui rédigeant, à elle aussi, deux convocations séparées. Elle plongea les yeux dans le visage de Harry ; son expression suffit à lui remettre les idées en place. Elle décida de ne pas insister.
Après s’être occupé des deux derniers fans encore conscients, Harry passa derrière le bar, retira leurs baguettes aux deux sorciers qu’il avait Stupéfixés, puis les ranima l’un après l’autre.
« Je vous arrête pour ivresse et tapage, trouble à l’ordre public et tentative d’agression sur un officier de la loi », déclara sèchement Harry au premier. « Nom ? » L’homme marmonna son nom, que la plume consigna. Content que le nom soit le bon, Harry ranima le compagnon et l’arrêta lui aussi.
« D’ordinaire, je porte trois paires de Portomenottes, mais je les ai toutes utilisées », leur dit-il. « Il y a trois agents de la Loi dehors. Dites-leur que je vous ai arrêtés et demandez à être envoyés dans leurs cellules. »
Les deux jeunes hommes le regardèrent, sidérés. « Faites-le », ordonna-t-il. « J’ai vos noms. Si vous tentez de fuir, je viendrai vous chercher, et vous finirez dans les cellules du Bureau des Aurors à la place. » Ils semblèrent peser leurs options.
« J’avais trois paires de menottes », reprit Harry à voix basse. « Comme je l’ai dit, je les ai toutes utilisées. Si je dois venir vous cueillir, ce sera les cellules des Aurors, et croyez-moi : vu ce que j’ai enfermé plus tôt dans la soirée, vous ne voudriez pas être leur voisin de cellule. » Les deux jeunes hommes croisèrent son regard, blêmirent et quittèrent le bar docilement.
Harry se tourna vers la salle pleine de fans des Pies, dont beaucoup applaudissaient. Il réclama le silence d’un geste.
« J’ai l’intention de signaler ces trois-là », fit-il d’un signe de tête vers les joueuses encore retenues dans son bouclier, « à la Ligue britannique et irlandaise de Quidditch pour avoir porté atteinte à l’image du jeu. »
«* On les a déjà dénoncées, t’sais ? *» cria un vieux sorcier coiffé d’un béret noir et blanc. «* Ça sert à rien. La ligue leur colle juste une p’tite amende d’riens. *»
« Je suis d’accord », répondit Harry. « C’est pourquoi je vais suggérer à la Ligue d’infliger un match de suspension. Je vais également les arrêter et leur remettre la même convocation pour trouble à l’ordre public que j’ai donnée à leurs fans. »
Comme il s’y attendait, plusieurs éclairs jaillirent une fois de plus derrière le bouclier. La convocation empêcherait les trois sorcières de jouer le dernier match de la saison samedi prochain. Si une suspension tombait, elles pourraient aussi être retirées de l’effectif des Harpies pour la demi-finale européenne.
Sans Olivia et Ginny, les Harpies perdraient sans doute contre les Tapesouafles de Quiberon, réalisa Harry avec regret. Il ignora les éclats de lumières des sortilèges derrière son bouclier et continua de s’adresser aux supporters des Pies.
« Les suspensions relèvent de la Ligue, je ne peux donc rien promettre, mais j’assisterai à l’audience et je ferai de mon mieux pour vous », leur assura-t-il. « Maintenant, quelqu’un souhaite-t-il porter plainte pour agression ? »
Il y eut beaucoup de marmonnements et d’autres éclats de lumières derrière Harry. Finalement, le vieux sorcier reprit :
«* Si tu fais c’que tu dis, ça nous ira ben. *»
« Merci », dit Harry. « Je m’attends à ce que l’avocat des Harpies arrive vite, et il essaiera sans doute de vous convaincre de retirer toute plainte. »
«* Ouais, » grogna le vieil homme, «* eh ben, bon courage à lui. »
Harry examina les trois Harpies ivres. Quelqu’un — probablement Ginny — avait levé le Maléfice du Saucisson de Lynette Baker. Du verre brisé gisait juste à l’intérieur du bouclier, entre lui et Ginny. Il supposa qu’elle avait lancé sa bouteille de Whisky-Pur-Feu dans sa direction, qu’elle avait percuté le bouclier et éclaté. À voir les débris, il restait très peu de liquide dans la bouteille. Il se demanda si Ginny avait tout bu.
Au même moment, il surprit Ginny en train de remonter sa jupe, déjà courte, pour montrer encore plus de jambe. C’étaient de très jolies jambes. Elle avait déjà défait quatre boutons de sa chemise, nota Harry ; difficile de ne pas le remarquer.
Il avait anticipé une forme d’attaque quand il ferait tomber son bouclier. Il avait espéré que ce ne serait pas la “petite amie contrite mais sexy”, mais il s’y attendait.
Il leva l’Assurdiato. Ginny embraya aussitôt.
« Harry, mon cœur », bredouilla-t-elle, « t’es un fan des Harpiesh, une s’spension de mach… »
« N’essaye même pas », coupa-t-il sèchement. « Baguettes rangées, toutes les trois. » Livy et Linny obéirent. Ginny, non. Harry soupira, mais abaissa tout de même son bouclier.
« Harry… » reprit Ginny. Elle essayait d’avancer en ondulant d’un air sensuel. La partie « onduler » fonctionnait ; il ne l’avait jamais vue aussi ivre. Il l’interrompit.
« Je vous arrête toutes les trois pour ivresse et tapage, et pour trouble à l’ordre public. » Il tenta de regarder Ginny dans les yeux, mais elle avait du mal à faire le point. « Et toi, Ginny, je t’arrête en plus pour avoir jeté un sort à un officier de la loi. »
Ginny fit un pas de plus vers lui.
« Un pas de plus et je demanderai deux matchs de suspension à la Ligue. »
« Mon prochain mach, c’esth la Coupe », hoqueta-t-elle, surprise.
« Je sais, Ginny ! Arrête. Tu es trop saoule pour dire quoi que ce soit de cohérent. Et, s’il te plaît, referme ta chemise. »
« Harry », implora Ginny d’une voix lamentable. « Rentronsh à la maishon. On peut s’arranger… ». Elle tenta de lui faire un clin d’œil, mais ne réussit qu’à fermer les deux yeux.
« Ginny, tu veux que je demande trois matchs de suspension ? »
Elle gronda, leva sa baguette et essaya de lui jeter un sort. L’alcool avait dramatiquement ralenti ses réflexes ; il dévia sans peine son maléfice de Chauve-Furie, qui ricocha sur les murs, brisa deux photos et fit se baisser les fans des Pies. Ginny avait l’air sauvage, furieuse et presque hors de contrôle. Elle garda sa baguette pointée sur Harry, attendant sa riposte. À la place, il rangea la sienne dans son manteau.
« On est ensemble depuis trois ans, et jusqu’à aujourd’hui, tu n’as jamais essayé de me jeter de sort », lui dit-il sur le ton de conversation. « Aujourd’hui, tu as essayé deux fois en l’espace de quelques minutes. »
« Et maint’nant t’as rangé ta baguette », cracha Ginny. « Alors qu’est-che qui ch’pashera si j’te jette un chort ? »
« Je pars », répondit doucement Harry.
Ginny plissa les yeux. « Quoi ? » demanda-t-elle. La menace ambiguë se frayait un chemin dans son cerveau embrumé.
« Je pars », répéta Harry. « Je m’en vais. Et tu seras face à la Brigade de Police Magique. »
« Harry… » recommença Ginny. Son sourire angélique ne tint que deux secondes ; elle était trop ivre pour le maintenir. « Pourquoi tout c’foin ? Après tout, on n’a blessé personne pour de vrai. »
« Vous avez ensorcelé au moins trois enfants dehors. »
« Mais », fit-elle d’un geste vague en chancelant pour garder l’équilibre, « et alors ? C’pas important, c’ne sont que— »
« “CE NE SONT QUE” ? » tonna Harry, perdant finalement patience et la coupant net. « Ce ne sont que QUOI, Ginny ? Que des fans des Pies ? » Il savait ce qu’elle avait été sur le point de dire. « Que des Écossais ? » enfonça-t-il, implacable. « Que des Sang-de-Bourbe ? Que des Moldus ? Que des traîtres à leur sang ? C’est pour ça que ce n’est pas important ? »
Il baissa la voix. Il n’avait jamais crié sur Ginny et n’aimait pas ça.
« Tu sais ce que je pense, Ginny ? Je pense que ce ne sont que des gens. Que des fans de Quidditch, comme toi et comme moi. Alors ? Tu vas me lancer un sort, ou tu vas ranger cette baguette ? »
La lèvre inférieure de Ginny tremblait. Il commençait enfin à l’atteindre.
« Désholée, Harry… » renifla-t-elle.
« Ce n’est pas à moi que tu dois des excuses, mais aux supporters des Pies. Surtout aux enfants que tu as ensorcelés. Et au shérif Campbell. » Ginny avait l’air perdue face à ce nom.
« L’agent de la Loi que tu as frappé avec un maléfice de Chauve-Furie quand il a ouvert la porte, juste avant que j’arrive. Il est dehors. Tu ne peux pas le rater : c’est celui qui a perdu trois doigts à la main gauche à la bataille de Poudlard. Il y a perdu sa femme aussi. »
À ces mots, Ginny éclata en sanglots, glissa sa baguette dans sa botte et fit un pas vers Harry, les bras tendus. Il eut toutes les peines du monde à ne pas la prendre contre lui et recula d’un pas qui lui fit monter les larmes aux yeux. La voir pleurer lui déchirait le cœur. Ils s’étaient souvent disputés, mais il ne l’avait jamais poussée aux larmes avant.
Ce n’était pas vrai. Il l’avait déjà fait, une fois, quand elle avait quinze ans. Il avait espéré ne jamais recommencer. Mais il venait de le faire. Elle était ivre morte, ne se rendait pas compte de ce qu’elle faisait, et il l’avait fait pleurer.
« On parlera quand tu seras sobre », dit-il tristement. « Dehors, toutes les trois, maintenant. »
Harry se dirigea vers la porte du pub pour l’ouvrir. Au même moment, Lynette Baker passa un bras autour des épaules de Ginny.
« Je t’ai toujours dit que tu serais mieux sans lui, » lança-t-elle bien fort. « Je te l’avais dit. C’est un coincé-du-cul et il n’a aucun sens de l’humour. »
Ginny décocha un coup de poing brouillon vers Lynette. La massive batteuse lâcha Ginny et recula hors de portée. Comme son coup passa dans le vide, Ginny perdit l’équilibre. Lynette riposta d’un direct sec et puissant en plein sur son nez. La tête de Ginny partit en arrière sous l’impact, elle recula de quelques pas jusqu’à butter contre une table et s’écroula au sol. Du sang jaillissait de son nez, coulait sur sa poitrine et tachait son maillot des Harpies. Elle se mit à tâtonner vers sa baguette, mais elle en était encore loin quand Linny dégaina la sienne.
« Petrificus Totalus. » Harry, qui avait sorti sa baguette dès le début de l’empoignade, fut beaucoup plus rapide. Lynette se figea et s’écroula comme une masse, rebondissant sur un banc. Harry enjamba la batteuse pour rejoindre Ginny. Il s’accroupit et l’aida doucement à se relever. Sitôt debout, elle s’effondra dans ses bras et enfouit son visage dans sa chemise, y étalant son sang.
« Olivia, dehors. Tout de suite, » ordonna Harry en soulevant Ginny dans ses bras. L’Australienne ouvrit la bouche pour discuter. « J’AI DIT TOUT DE SUITE ! » rugit-il. La Poursuiveuse Australienne le regarda avec effroi avant d’obéir.
Harry déposa délicatement Ginny sur une table et arrêta le saignement. Il examina son visage : son nez n’était pas cassé, mais elle aurait un œil au beurre noir au matin. Stopper l’hémorragie était facile, c’était du niveau de la première année de formation d’Auror. En revanche, même les sorts de nettoyage les plus simples continuaient à lui résister. Il n’avait jamais eu à les apprendre sérieusement, parce qu’entre eux, Kreattur, Molly et Ginny étaient capables de tout nettoyer. Il examina sa petite amie maculée de sang et sa propre chemise autrefois blanche. C’était sa dernière chemise propre d’uniforme. L’autre était portée par Lavande – sans grand-chose d’autre – quand il l’avait quittée.
En soupirant, Harry tenta d’aider Ginny à se remettre debout. Elle s’effondra de nouveau contre lui. Ses jambes ne semblaient plus vouloir fonctionner. Il la rattrapa, la souleva une fois de plus dans ses bras et se dirigea vers la sortie. Avant de passer la porte, il jeta un coup d’œil aux supporters des Pies ; certains dirigeaient des regards revanchards vers Lynette, allongée raide sur le sol.
« Personne ne la touche et personne ne lui jette de sort, » prévint-il. « Sinon je vous arrête aussi. » Puis il sortit.
Dehors, une foule s’était amassée autour du pub, et plusieurs flashes l’assaillirent lorsqu’il franchit le seuil avec Ginny dans les bras. Harry grogna : il ferait encore la une des journaux le lendemain.
« La troisième est encore sous un Maléfice du Saucisson à l’intérieur, » lança Harry en voyant accourir les agents Huddleston et Moon. « Faites attention, elle est violente. »
Il alla déposer Ginny sur l’une des tables extérieures. Elle tenta de se redresser, puis finit par abandonner, se rallongea, ferma les yeux et agrippa le bord de la table à deux mains.
« Harry, » haleta-t-elle. « Arrête de faire bouger la table. Ça me donne la nausée. »
« Je ne peux rien faire pour la table, Ginevra, » répondit-il, pour voir. Elle ne tiqua pas, ne releva même pas son utilisation de son prénom complet ; elle était ivre morte, conclut-il.
Les Bailiffs Huddleston et Moon firent léviter Lynette Baker, toujours pétrifiée, hors du bar.
« Pourriez-vous amener les prévenues ici, s’il vous plaît, » demanda Harry. « Vous avez des cellules à Édimbourg, shérif Campbell ? »
«* Aye, monsieur. *»
« Appelez-moi Harry, s’il vous plaît, » dit-il. « Donc c’est là que les emmèneront vos Portomenottes ? »
«* Aye, monsieur… Harry… C’est là que les deux jeunes sont déjà partis. *»
« Parfait. Je vous serais reconnaissant de pouvoir utiliser vos menottes. » Harry se tourna vers les trois joueuses. « Olivia Aikenhead, Lynette Baker et Ginevra Molly Weasley, je vous arrête pour trouble à l’ordre public et ivresse manifeste. »
Pendant qu’il parlait aux Harpies, Harry surveillait Campbell du coin de l’œil. Le shérif rejoignit ses collègues et se lança dans un aparté rapide avec eux. Il vit les agents sortir différentes paires de menottes de leurs robes. Harry esquissa un sourire : il venait de comprendre.
L’une des premières innovations qu’il avait développées avec Ron et Neville, alors qu’ils étaient encore stagiaires, avait été de concevoir des menottes Portoloins. Les Portomenottes, comme on les appelait désormais, transportaient les détenus vers des cellules précises dès qu’elles se verrouillaient. C’était l’un des nombreux projets qui les avaient occupés pendant que Ginny, Hermione, et la petite amie de Neville à l’époque, Romilda Vane, étaient encore à Poudlard.
Kingsley Shacklebolt en personne avait félicité George pour ce nouvel équipement fort utile. L’adoption des menottes par le Ministère avait redressé les finances de Weasley Farces pour Sorciers Facétieux. Quand Ron avait enfin convaincu son frère de se diversifier, ils avaient enchaîné sur les uniformes anti-sortilèges pour le Bureau des Aurors.
Quelques mois après l’introduction des Portomenottes, Harry avait passé deux mois de formation avec la Brigade de police magique. Trois semaines mémorables s’étaient déroulées aux côtés d’un Bailiff vétéran nommé Albert Thynne. Il avait alors découvert que l’une des tâches les plus courantes – et les plus détestées – des agents était la gestion des ivrognes. Le voyage en Portoloin désorientait souvent, mais Harry avait été surpris par le nombre de détenus qui arrivaient en cellule recouverts de leur propre vomi.
Thynne n’en avait rien dit jusqu’à la veille du départ de Harry, où il lui avait parlé d’un petit maléfice « pratique » qui s’était répandu comme une traînée de poudre parmi les agents dans les jours ayant suivi l’apparition des Portomenottes. On les appelait les ‘vomennottes’ : un sortilège modifiait légèrement les Portomenottes, rendant le voyage beaucoup plus désorientant et, chez pour tout ivrogne, immanquablement vomitif.
« Mieux vaut qu’ils se couvrent eux-mêmes que de m’en mettre partout, fiston, » avait confié Thynne.
« Auror Potter, » intervint Hamish Campbell, « si c’est vous qui les menottez, vous serez l’officier d’arrestation et vous devrez rester en service jusqu’à la fin de la procédure. »
« Appelez-moi Harry, Hamish. » Il eut un sourire sans joie. « Je sais ce que je fais, j’ai suivi un module de Droit magique. Je m’attends à passer une bonne partie de la nuit dans vos bureaux. »
« Je… euh… » commença Campbell.
« Lesquelles ne sont pas des vomenottes ? » demanda Harry.
Campbell, pris de court, lui tendit une seule paire.
« Ah, » fit Harry. « Je ne peux pas faire de favoritisme. » Il glissa ces menottes-là dans sa poche. « Il me faudrait trois paires, s’il vous plaît. »
« Personne ne le saurait, » lui assura Campbell.
« Moi, si. Et vous aussi, » répondit Harry.
Huddleston lui remit silencieusement trois autres paires.
« Olivia, » ordonna Harry. La Poursuiveuse s’avança, docile.
« Tu lui manquais. Elle t’aime », souffla-t-elle en lui tendant les poignets.
« Je sais. Enfin, j’espère que je le sais », répondit-il sombrement en lui serrant les menottes et en la regardant disparaître.
Harry leva ensuite le maléfice qu’il avait jeté à Lynette pour qu’on puisse lui passer les menottes, mais la batteuse décida d’essayer de combattre son arrestation. Campbell, Huddleston et Moon durent la plaquer au sol et lui tirer les bras dans le dos. Harry la menotta, et elle aussi disparu.
Pendant ce temps, Ginny avait réussi à se redresser sur la table. Elle oscillait sans un mot, des larmes silencieuses roulant sur ses joues. Lorsqu’Harry s’approcha, elle tendit docilement les bras. Il referma les menottes d’un geste rapide, et elle disparut à son tour dans un halo bleu, vers une cellule.
« Mesdames, messieurs », tenta Harry pour calmer la foule. Peine perdue. Il leva les bras, réclamant le silence. « Mesdames, messieurs. Comme vous l’avez vu, les fauteurs de trouble ont été convoqués ou arrêtés. Nous allons partir d’ici à quelques minutes. Je suis désolé si cela a gâché votre soirée. »
« Monsieur Potter ! » appela une voix. « Je suis avec la Gazette du Sorcier. Un commentaire sur l’arrestation de votre ex-petite amie ? »
« Non », répondit Harry sèchement en levant son sortilège d’Anti-Transplanage. Le mot « ex » le heurta. Est-ce qu’il y avait quelque chose qu’il ne savait pas ? Même si c’était le cas, il n’allait pas en discuter avec un journaliste de la Gazette.
« Hamish, pourriez-vous demander à Heather et Mark de retourner à votre bureau pour commencer… » La voix de Harry se brisa un instant alors que sa colère retombait enfin et que le poids de ce qu’il venait de faire lui tombait dessus. Il se ressaisit rapidement. « … pour commencer la mise en cellule ? »
Campbell transmit l’ordre et les deux agents Transplanèrent aussitôt.
« Et nous, qu’est-ce qu’on attend, Harry ? » demanda Hamish.
Harry désigna du doigt le haut de la colline, sur la route, où un sorcier d’une trentaine d’années et tiré à quatre épingles descendait vers le bar, les mains jointes dans le dos.
« Qui est-ce ? » demanda Campbell.
« Monsieur Tavistock », répondit Harry assez fort pour que sa réponse serve également d’interpellation pour l’arrivant : « Pourriez-vous m’accorder un instant ? »
« L’avocat des Harpies », souffla-t-il ensuite à Hamish tandis que le nouveau venu s’avançait vers eux, sourire aux lèvres, main tendue.
« Harry », lança Tavistock, « un plaisir, comme toujours. Les filles ont encore un peu trop fêté leur victoire, je suppose ? Je suis étonné de vous voir ici. Vous êtes venu voir comment allait votre petite amie ? Je suis sûr que le patron ne portera pas plainte. » L’avocat s’arrêta devant Harry, sa main toujours tendue. Harry ne la serra pas. Il n’aimait pas Gus Tavistock. Il n’aimait pas ses cheveux noirs lustrés ; il n’aimait pas sa posture arrogante ; il n’aimait pas son ton doucereux.
Il l’avait rencontré la première fois au mois de juillet, à Holyhead, lors de la réception organisée pour accueillir les deux nouvelles recrues des Harpies. Lui et Ginny s’étaient moqués de l’avocat en rentrant au Square Grimmaurd.
« Harry Potter. » Ginny avait arpenté la cuisine, les mains dans le dos, imitant à la perfection sa démarche et sa voix soyeuse et distinguée. Elle lui avait tendu la main : « Augustus Tavistock, avocat des Holyhead Harpies. Enchanté. Je suis un aussi visqueux et condescendant que Severus Rogue, et un m’as-tu-vu aussi vaniteux et orgueilleux que Gilderoy Lockhart. J’espère sincèrement que nous serons amis. »
Harry revint au présent et réalisa que Tavistock lui parlait.
« Excusez-moi ? » fit-il.
« Où sont mes clientes ? » répéta Tavistock, plus sec.
« Les filles qui ont un peu trop fait la fête ? En prison », répondit Harry. « Vous pourrez leur parler dès qu’elles auront été enregistrées. »
« En prison ? » Tavistock se tourna d’un bloc vers Campbell. « Vous avez mis trois joueuses de Quidditch, dont deux internationales, en prison. Pour avoir un peu trop bu. Vous espériez voir votre nom dans les journaux, espèce de petit provincial parvenu ? Eh bien rassurez-vous, il y sera. J’en recourrai à vos supérieurs. Quel est votre nom ? »
« Auror Harry James Potter », répondit Harry aussitôt. Tavistock se figea, se retourna vers lui et remplaça son expression choquée par une mine préoccupée.
« Harry », attaqua-t-il, mielleux, « votre petite amie commence à être plus célèbre que vous. Vous n’êtes pas un peu jaloux ? Ou bien vous vous êtes disputés ? Elle vous a quitté, pas vrai ? Vous cherchez une petite vengeance en la mettant en cellule pour la nuit ? Relâchez-la donc, elle… et ses amies. Quelles autres options avez-vous ? Pensez à l’image que vous aurez quand je publierai mon communiqué. »
« Oh, de la mauvaise presse ? » répliqua Harry, impassible, la voix chargée de sarcasme. « Je n’ai encore jamais connu ça. Comment vais-je survivre ? »
Hamish Campbell laissa échapper un reniflement amusé.
« Alors, Maître Tavistock », poursuivit Harry, « par quoi voulez-vous commencer ? Parler aux personnes présentes et essayez d’acheter leur silence et de leur faire retirer leurs plaintes ? Ou bien aller voir vos clientes en cellule ? »
Tavistock vira au cramoisi. « Vous n’avez pas intérêt à faire de moi un ennemi, Potter », fanfaronna-t-il. « Je peux être un adversaire dangereux. »
« Oh, un ennemi dangereux ? Je n’en ai jamais eu non plus », cracha Harry.
Tavistock pâlit en réalisant ce qu’il venait de dire. À court de mots, il tourna les talons et fila vers l’auberge.
« Le bar est ouvert, et l’avocat des Harpies vient d’y entrer. Pourquoi ne pas lui demander de vous payer un verre ou deux ? » lança Harry aux supporters des Pies restés dehors.
Un mouvement de foule se lança vers la porte.
« On y va », dit Harry en saisissant le bras de Campbell. « Je vous serais reconnaissant de m’emmener à vos bureaux. »
Au moment de Transplaner, Harry s’inquiétât de l’effet que les Portomenottes avaient dû avoir sur Ginny. Il aurait dû utiliser la paire non ensorcelée. Il avait pensé davantage à la mauvaise presse qui suivrait immanquablement un soupçon de favoritisme qu’au bien-être de sa petite amie. Il se maudit en silence.

amelia (Guest) on Chapter 2 Wed 10 Dec 2025 10:35PM UTC
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Eurystic on Chapter 2 Thu 11 Dec 2025 10:43AM UTC
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